Imaginons quelques situations que vous pourriez vivre ou avoir déjà vécu…
Enthousiaste suite à une formation, j’ai proposé à un groupe dont je suis membre de prendre une décision par consentement. Je leur ai dit que cela allait nous permettre de gagner du temps et aussi de tenir compte de toutes les opinions. Je pense que j’ai bien suivi le processus. Mais les choses ont pris une tournure compliquée, de grosses tensions se sont manifestées, et la réunion s’est interrompue. Maintenant je ne sais plus quoi faire…
Chloé
J’ai créé une association il y a plusieurs années avec des amis. Nous avons fonctionné avec un cercle sociocratique, cela marchait plutôt bien. De nouveaux membres actifs nous ont rejoint depuis quelques mois et je ne sais pas comment adapter notre gouvernance. Comment à la fois garder les intentions de départ et leur laisser l’autonomie pour la mise en place de nouveaux projets ? Actuellement cela part un peu dans tous les sens ! Quelle est ma responsabilité aujourd’hui vis-à-vis de l’évolution de l’association ?
Étienne
Je suis directeur d’une structure de l’Économie Sociale et Solidaire de 15 personnes. Je voudrais démarrer une expérimentation de la sociocratie avec quelques personnes volontaires. Je me demande comment je peux m’y prendre pour mettre toutes les chances de mon côté que l’expérience soit réussie. En particulier, je trouve cela compliqué de dire : « dans une réunion de cercle nous sommes à équivalence » – alors que le reste du temps je suis leur directeur !
Maxime
Vous connaissez des outils tels que le processus de décision par consentement ou encore l’élection sans candidat. Vous connaissez aussi les principes de la méthode sociocratique, et en théorie cela vous paraît simple. Mais en pratique, vous vous rendez compte que ce n’est pas si évident que vous l’imaginiez. Ou bien ce ne l’est plus depuis qu’un incident apparemment anodin a tout fait dérailler ? On peut dire : « C’est à cause de l’ego de telle personne ». Et si vous cherchiez plutôt ce que vous pouvez faire pour améliorer le fonctionnement systémique du groupe ?
Je vais vous expliquer pourquoi et comment je propose un espace de supervision individuelle aux personnes :
- qui entreprennent de mettre en place une gouvernance participative,
- ou qui exercent une responsabilité dans une telle gouvernance, pour la maintenir vivante et en évolution.
Même si cela peut paraître paradoxal : l’expérience montre qu’il n’y a pas de gouvernance participative fonctionnelle et pérenne sans un leadership consistant. Bien sûr, il s’agit d’une forme de leadership particulière. Comment la supervision, telle que je la pratique, est-elle au service d’un leadership sociocratique ?
Être soutenu-e, pour que l’on puisse compter sur vous
Les fonctions de la supervision
Recourir à une supervision est reconnu comme une démarche utile à toute personne dont l’activité comporte une forte dimension humaine, relationnelle. On lui attribue en général plusieurs fonctions :
- Elle participe à votre formation continue, grâce à une démarche réflexive basée sur des situations concrètes vécues.
- C’est une pause pour prendre soin de vous-même, vous ressourcer, grâce au soutien bienveillant d’une personne extérieure à votre organisation.
- Elle vous offre un espace de prise de recul pour vos questionnements sur le sens, l’éthique ou la déontologie, dans votre activité professionnelle.
La gouvernance participative : un nouveau sport !
C’est une transformation en profondeur des fonctionnements collectifs. Avant d’acquérir de nouveaux repères, tout le monde sort de sa zone de confort ! Pour inspirer de la confiance dans cette période de mutation, il faut soi-même se sentir en sécurité. La supervision permet au porteur du projet de ne pas être seul avec ses responsabilités. Dans le cadre d’une gouvernance participative, les cadres / managers ont besoin de s’approprier la nouvelle définition de leur rôle. Cela suppose des compétences particulières et aussi une position équilibrée concernant le pouvoir : ni dominatrice, ni soumise au groupe !
Être conscient-e qu’on ne maîtrise pas tout…
Confiance et prudence !
Dans ce sport, il est prévisible de traverser des moments de doute, de faire des erreurs douloureuses, de se retrouver pris dans des situations conflictuelles confuses et inextricables… c’est la vie des humains ! Avoir confiance dans la nature humaine est un moteur, et à la fois il est prudent de poser des cadres de sécurité, tant pour prévenir des crises du collectif, que pour en sortir sans trop de dommages. A plusieurs reprises, j’ai vécu des situations où notre association La Croisée des Chemins se serait effondrée si je n’avais pas eu le soutien de personnes extérieures, compétentes et de confiance, pour m’aider à y voir clair et à faire face. La corde d’escalade m’a semblé une belle métaphore de ce lien mis en place par la supervision, qui reste présent même en dehors des séances.
Une démarche émancipatrice ?
Beaucoup de personnes sont attirées par les pratiques de gouvernance participative parce qu’elles rejettent des carcans qui brident la liberté individuelle. S’appuyer sur une relation de supervision peut alors être perçu comme une forme de dépendance vis-à-vis d’une autorité extérieure (projection du rapport maître/élève ou parent/enfant). J’y perçois plutôt de la lucidité par rapport au risque d’aveuglement et d’isolement qu’entraîne une position de leader. Il est également sain de ne pas se reposer à 100% sur ses coéquipiers. Un groupe vivant en circuit fermé a tendance à adopter un fonctionnement figé et une manière de penser dogmatique, afin de maintenir sa cohésion.
Dans ma pratique, j’offre une relation d’équivalence : ‘super-vision’ correspond à une position réflexive ou ‘méta’ et non à la ‘supériorité’ d’un expert.
De la structure et de la créativité
Comment prendre en compte vos besoins ?
En soutien à votre rôle dans la mise en place ou l’évolution d’une gouvernance participative, je suis attentif à co-élaborer et à faire vivre de façon évolutive un cadre de confiance et de sécurité :
- Explicitation de vos attentes, de vos objectifs ;
- Explicitation et adaptation de ma méthode de travail à vos besoins ;
- Accord sur des engagements (confidentialité, …) ;
- Accord sur la durée, la fréquence et le coût des séances.
La règle pour les décisions sur ce cadre est le consentement libre et éclairé. Il en résulte un document écrit, accessible, base d’un engagement mutuel au service de votre projet.
Qu’est-ce qu’on fait dans une séance de supervision ?
Le déroulement d’une séance peut être très variable selon ce qui est présent pour vous.
- Avez-vous besoin de réfléchir pour préparer une proposition pour votre groupe ?
- Avez-vous besoin de prendre du recul sur une situation tendue où vous êtes impliqué-e ?
- Avez-vous besoin de faire un bilan sur votre place dans l’organisation et vos apprentissages ?
- Avez-vous besoin d’inspiration pour clarifier votre positionnement dans la relation avec des collègues ?
Je ne cherche pas à vous conduire quelque part, ni à vous faire suivre un chemin pré-établi. Je suis à vos côtés, disponible pour explorer ce qui est important pour vous. Cela peut être une situation, une problématique, une question identifiée en amont. Elle peut aussi émerger lors de la séance. La durée de l’entretien peut être répartie entre plusieurs sujets. Bref, c’est vous qui pilotez le contenu : c’est votre supervision après tout !
Une constante à chaque séance : elle s’ouvre avec un partage mutuel « avec quoi j’arrive ? » et elle se clôt de la même façon « avec quoi je repars ? ». Ainsi, nous prenons à la fois soin de répondre à vos besoins du jour et d’entretenir la qualité de la relation de supervision : pouvoir exprimer et recevoir des feedback est une compétence clé, à laquelle la relation de supervision permet de s’entraîner dans un contexte privilégié.
J’espère que cet article vous permet d’y voir plus clair. N’hésitez pas à me contacter si vous avez des questions !
Thomas Marshall
Formateur et superviseur en gouvernance participative